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Interview de Marc Bonneau, parachutiste professionnel

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Koifaire.com a interviewé Marc Bonneau, moniteur d’état de parachutisme qui a importé le saut en tandem en France. Figure importante dans le monde du parachutisme, Marc Bonneau a accepté de répondre à nos questions, et nous en dit plus sur lui ainsi que sur sa discipline…

Photo de Marc Bonneau, site de Air Loisir
Photo de Marc Bonneau, site de Air Loisir

Bonjour Marc Bonneau, pourriez-vous vous présenter à nos internautes?
MB : Je m’appelle Marc Bonneau.
J’ai plus de 17000 sauts, 11000 sauts en tandems, à peu près 4000 sauts de AFF (l’Accelerated freefall ) /PAC (progression accompagnée en chute).
J’ai également eu la chance de participer à 3 records du monde aux Etats-Unis à l’époque où on faisait des records du monde de grande formation.
Mon école est Air Loisir, et est basée à Pujaut.

Je suis aussi la première personne en France et en Europe à avoir fait sauter des personnes handicapées en tandem, et je suis surtout un privilégié qui a la chance de vivre sa passion !

Pourriez-vous nous en dire plus sur votre rencontre avec le parachutisme : comment êtes-vous tombés dedans ?
MB: J’avais fait du parachutisme à l’armée, mais l’armée m’avais un peu dégouté du parachutisme ( car ce sont des sauts en ouverture automatique sans réel chute libre, et ce que j’aime, c’est la chute libre…)
Puis un jour, j’ai fait un pari avec ma sour, comme quoi je ferai 100 sauts et qu’après 100 sauts, j’arrêterai… sauf que « heureusement », le parachutisme est comme une drogue et je suis tombé dedans !

Que recherchez-vous dans cette pratique ?
MB : La liberté, quitter un avion, être libre…on est dans la 3ème dimension !

De quelle hauteur avez vous sauté le plus haut ?
MB : 8800 mètres avec oxygène, mais la chute ne dure pas très longtemps non plus, à peu près 3 minutes pour une vitesse d’à peu près 380-400km/h au départ (car plus on s’approche du sol, moins on va vite car la densité de l’air augmente).

Quel est votre parcours dans le monde du parachutisme ?
MB : Je sautais dans les para-clubs, j’étais bénévole. J’étais à l’époque instructeur au sol.
Je suis parti ensuite aux Etats-Unis où j’ai passé tous les concours pour être instructeur AFF, puis Tandem Master, puis Tandem Master Examiner (soit formateur de formateurs).

J’ai 2 casquettes :
– J’ai le BEES, avec la qualification AFF / PAC, Tandem, et Handicapés, et j’appartiens à Jeunesse et Sport.
– Je suis parachutiste professionnel avec la qualification AFF / PAC, Tandem, et Handicapés, et j’appartiens au ministère des transports.

Vous êtes donc le précurseur du saut en tandem en France puisque c’est vous qui l’avez introduit. Comment le saut en tandem était-il alors perçu ?
MB : Avant que la fédération Française de parachutisme me fasse venir en France, en 1986, j’ai fait le tour de France des plus grands clubs, para-clubs et zones de sauts. J’ai alors parlé du tandem… et « 80% » des gens ne semblait pas convaincu…

Je trouvais que c’était quelque chose de fantastique car on peut emmener quelqu’un qui n’a jamais sauté lui faire découvrir la chute libre en toute sécurité !

Et en 1987, la fédération française de parachutisme (dont Bernard Colas était président et Mr Bernachot le directeur technique national) m’a fait venir en France pour que je participe à la formation de tous les futurs pilotes et moniteurs de tandem !
A l’époque j’étais le premier français à avoir eu la qualification de Tandem-Master-Examiner et que j’avais donc eu la chance d’apprendre cette méthode et d’être breveté par celui qui l’avait inventée, c’est-à-dire Bill Booth.

Vous êtes également le premier à avoir fait des sauts en tandem avec des personnes handicapées. Pouvez-vous nous en dire plus ?
MB : Un jour, j’ai une personne qui est venue me voir et qui m’a demandé de faire sauter son ami handicapé, car il trouvait que je posais les gens en douceur. Je me suis dit pourquoi pas, surtout si on trouvait un système pour que les jambes ne touchent pas le sol à l’atterrissage.

Suite à ça, avec Mr Belda, on a élaboré ensemble le premier prototype pour faire sauter les personnes handicapées.
J’ai également reçu des cours par des kinés, des ostéopathes, des médecins dont le Docteur Rosati qui m’a beaucoup aidé !

Aujourd’hui, j’ai fait près de 900 sauts en tandem avec des personnes handicapées.
Je suis même la seule personne à avoir eu l’autorisation à faire sauter des personnes handicapées la nuit en France, mais aujourd’hui je ne le fais plus.

Faire sauter des personnes handicapées, c’est surtout des rencontres formidables qui apportent énormément, car ce sont des personnes qui ont un moral extraordinaire… !
Une personne handicapée peut, selon son handicap, éventuellement prétendre à sauter seule : c’est au cas par cas !
Par exemple, il existe un cas unique aux Etats-Unis où une personne aveugle a sauté seule avec un bipeur lui donnant l’altitude d’ouverture et une fois le parachute ouvert, il était guidé par radio comme le sont aujourd’hui nos élèves!

A qui s’adresse le parachutisme et quel serait le mot d’ordre de cette discipline ?
MB : A tout le monde ! En France, en tant que Jeunesse et Sports ; les enfants peuvent sauter à partir de 15ans. Les personnes qui ont les vertiges pourront aussi sauter en parachute, car ne peuvent avoir le vertige que les gens qui sont en contact avec le sol !
Mais j’ai eu la chance, en dehors des structures fédérales et en tant que professionnel, de faire sauter 500 enfants entre 6 ans et 14ans.
Bien entendu les enfants doivent être volontaires et pas poussés par leur parents, car sinon, je refuse !

Le mot d’ordre…ce serait : «Essayez-le!» ou «un rêve facile à réaliser pour tous!» (Et je terminerai par : «soyez les bienvenues dans le plus grand et le plus beau stade du monde!»)

Pouvez-vous nous en dire davantage sur votre école Air Loisirs ?
MB : C’est Air Loisir à Pujaut (l’aérodrome de Pujaut étant le plus grand de France) et le siège social se trouve à Lattes près de Montpellier pour ainsi dire.

Ecole de parachutisme, Air Loisir, Pujaut
Ecole de parachutisme, Air Loisir, Pujaut

L’école a été créée en 1989 aux Etats-Unis, puis enregistrée par la suite en France.

Notre école propose les sauts en Tandem mais propose également la possibilité, pour une personne n’ayant jamais sauté de sa vie, de réaliser à la fin de la journée de formation une chute libre, seule, encadrée par 2 instructeurs avec son propre parachute ! C’est l’initiation PAC.

Avec la PAC (progression accompagnée en chute libre) aujourd’hui, on peut prétendre à sauter seul après quelques sauts au bout d’un stage d’une semaine : les cours sont intensifs et vont à l’essentiel, alors qu’auparavant, c’était fastidieux…

Pourriez-vous dire que le parachutisme est dangereux ?
MB : Le parachutisme n’est pas dangereux, car c’est une question de bon sens ! Dans les airs, l’erreur ne peut être que humaine, et le parachutisme n’a jamais été aussi sécurisé !
Il faut respecter les règles et écouter son moniteur.
L’information est continuelle, et on apprend toujours.

Quelle est votre vision du parachutisme et de votre métier ?
MB : Le parachutisme est une discipline qui se mérite. A 4000 mètres d’altitude, on ne peut ni mentir, ni tricher.
Le parachutisme n’est pas spécialement une activité très physique mais TRÈS intense au niveau psychologique !
Quant aux personnes qui viennent dans mon école pour des sauts en tandem ou autre, je suis là pour m’occuper d’eux et leur faire passer un bon moment !
Je suis, si on veut, comme un marchand d’adrénaline !

Pourriez-vous nous faire la description d’un bon élève en parachutisme ?
MB : Une personne qui n’a pas peur n’est pas un bon élève ! Un bon élève doit écouter son instructeur, ne pas subir lorsqu’il est en chute, contrôler et restituer ce qu’il a maintes fois répété au sol !

Quel est le meilleur saut en parachute que vous aillez fait ?
MB : Au-dessus de Bangkok pour l’anniversaire du roi de Thaïlande ou encore au-dessus des chutes d’Iguazù au Brésil !
Enfin, tous mes sauts sont merveilleux…
Les sauts de nuits sont aussi assez épiques !

Avez-vous déjà testé les souffleries ?
MB : C’est génial ! D’ailleurs, c’est plus dur en soufflerie qu’en réalité, car c’est plus précis, plus pointu. C’est intéressant de passer en soufflerie avant de faire son premier saut, notamment car cela enlève le stress.

Auriez-vous quelque chose à ajouter à nos internautes ?
MB : « Qui ose gagne, qui ose vaincra», telle est la devise des paras !… Il faut venir essayer (et le vouloir bien sûr) !

Merci beaucoup Marc Bonneau pour votre patiente et votre très bonne humeur !
Il est intéressant de rappeler également que le parachutisme est le sport (toutes disciplines confondues) en France qui rapporte le plus de médaille d’or à la France…

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